La lettre de motivation de Julien Chorier aura fait le tour du web. Ce Clermontois d’origine a « passé peu de temps » (jusqu’à la deuxième section de maternelle) dans la capitale auvergnate mais se « souvient bien de la place de Jaude ». Ses parents, eux, y ont passé plus de temps. Et pour cause : son père était directeur du théâtre de Clermont pendant des années. Julien Chorier, lui, s’est ensuite basé à Annecy, puis Paris, surtout pour des stages.
Son Master Marketing et Management en poche depuis l’automne 2015, le jeune diplômé de l’école de management Kedge Business School de Bordeaux espérait décrocher un emploi dans la communication ou le marketing. Après une vingtaine de candidatures sans réponse et des lettres formatées, il décide de prendre un virage à 180 degrés. Si ses diplômes et son expérience dans le domaine ne suffisent pas, Julien Chorier va tenter une autre approche.
Terminées les formules toutes faites, il décide de remplacer tous les mots qui ne lui semblaient pas indispensables par « blabla » et de n’aller qu’à l’essentiel pour ses nouvelles candidatures.
D’abord
interviewé par le HuffPost, Julien Chorier raconte : « J’en avais assez d’écrire toujours la même chose, de rester dans le modèle très formaté de la lettre de motivation. Avec un ami, on s’est dit un jour que tout ça c’était vraiment du ‘blabla’ et que les entreprises n’avaient sûrement pas le temps de tout lire. J’ai repensé à cela et j’ai décidé de remplacer tout ce qui n’était pas essentiel dans ma lettre par ‘blabla’.
Si ses « amis ont essayé de l’en dissuader », Julien Chorier décide de tenter le coup. Joint par
La Montagne, il explique qu’il a décidé d’adresser cette drôle de lettre à deux entreprises parisiennes, qui pourraient selon lui être « sensibles à ce genre de lettre atypique ». Quand on lui pose la question s’il n’a pas eu peur que ça « grille » ses chances, il répond sans détour : « J’ai évidemment eu un peu peur mais à la fois, ça m’amusait. Je me suis dit que si l’entreprise était réceptive à cette démarche, ça voulait dire qu’ils étaient ouverts et qu’on pourrait bien s’entendre. »
A son premier envoi, il ne reçoit aucune réponse. Le second sera le bon. L’honnêteté s’avère payante et le coup de bluff plait à la start-up parisienne
Alumnforce. Les recruteurs, curieux, ont cherché à comprendre qui se cachait derrière tout ce blabla. Mais aussi à savoir s’il est véritablement un candidat sérieux.
Et il s’avère que Julien Chorier fait l’affaire : son entretien dans cette entreprise spécialisée dans les réseaux sociaux privés (écoles, universités, associations d’anciens élèves) a débouché sur un emploi en tant que chargé de communication et marketing. Et ce n’est pas n’importe quel contrat : le jeune homme a directement signé un CDI ! Et prendra son poste mardi prochain.
Sincèrement heureux de ce qui lui arrive, il confie ne pas « pouvoir rêver mieux ». L’écho médiatique a été important pour le jeune homme, mais aussi pour l’entreprise parisienne, qui compte bien continuer à recruter de manière atypique dans les mois à venir. Julien Chorier, lui, a vu son nombre de contacts considérablement augmenter. Certains recruteurs vont jusqu’à lui envoyer des messages sur LinkedIn pour lui dire que sa lettre leur a plu et les a fait rire. Sur Facebook aussi, les gens lui écrivent. « J’ai eu pas mal de messages de personnes que je ne connaissais pas qui me disaient que cela leur avait donné des idées pour de futures candidatures. Jeudi soir, je reçois une invitation d’une italienne, j’ai tout de suite cru à un spam. En réalité, elle voulait me dire qu’elle allait tenter de faire sa propre lettre « bla-bla ». Tant mieux si cela peut donner des idées à d’autres ! ».
Le sympathique communiquant a été « assez étonné de la tournure que ça a pris, [tout] est allé très vite ». Selon lui, cette démarche a certainement « touché les personnes parce que nous sommes dans une période compliquée où beaucoup de gens cherchent un emploi, surtout ceux de ma génération. Sans prétention, je pense que cet engouement est symbolique de ce qui se passe chez les jeunes. On voudrait oser, mais on craint souvent que cela soit mal pris. Si ma lettre permet aux gens d’être inspirés, d’oser, d’avoir un peu d’espoir et peut-être d’un jour décrocher un boulot, je serai vraiment content. » Même si Julien Chorier estime qu’évidemment, ce genre de lettre ne peut pas être envoyé à toutes les catégories d’emploi. Il cite par exemple les banques ou cabinets d’avocat, moins enclins à ce genre de petite folie.
Si envoyer plusieurs lettres de motivation avant de décrocher un travail est pour lui un « passage obligé » quelque soit le domaine, le tout nouveau chargé de communication invite les demandeurs d’emploi à « toujours chercher à se différencier ».
Lison Lagroy- La Montagne.